Casino du Liban : Or, Cygnes et Oubli; paradoxe d’un lieu mythique

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Casino du Liban : un joyau entre faste, culture et défis.

Dominant la baie de Jounieh depuis les hauteurs de Maameltein, le Casino du Liban incarne bien plus qu’un simple établissement de jeux. C’est un symbole de prestige, de culture et d’élégance à la libanaise, à la fois scène artistique, moteur économique et mémoire vivante d’un Liban cosmopolite et rayonnant.

Casino du Liban : une histoire dorée aux allures de mythe.

Inauguré en 1959, le Casino du Liban a été imaginé comme le Monte-Carlo du Moyen-Orient. Très vite, il devient le rendez-vous de la haute société, attirant artistes internationaux, têtes couronnées, diplomates et célébrités. Des noms comme Charles Aznavour, Dalida ou Louis Armstrong s’y produisent. C’est l’époque d’un Liban qui danse sur un fil entre Orient et Occident, entre rêve et réalité.

May Moussa, femme de scène et de direction.

Parmi les figures essentielles de cette épopée, May Moussa, peintre, actrice, danseuse, mais aussi femme de poigne, a joué un rôle déterminant. D’abord meneuse de revue, elle finit par graviter vers la direction artistique, insufflant au Casino un esprit à la fois audacieux et raffiné. Grâce à elle, le cabaret prend une dimension inédite, mêlant tradition libanaise et modernité européenne, dans une scénographie toujours impeccable.

Guerres, fermetures, renaissance.

Mais les fastes du Casino ne l’ont pas épargné des secousses de l’Histoire. Pendant la guerre civile, il ferme ses portes en 1989. Sa réouverture n’a lieu qu’en 1996, après une rénovation colossale de près de 50 millions de dollars. Depuis, l’établissement tente de retrouver son souffle, entre nostalgie du passé et réalités économiques actuelles. La concurrence, la crise financière, la dévaluation de la livre libanaise ont porté des coups durs à son rayonnement.

Le Casino du Liban dans l’économie libanaise.

Malgré cela, le Casino du Liban reste un acteur économique important. Il emploie plusieurs centaines de personnes et draine une clientèle à la fois locale et internationale. Il contribue indirectement à faire vivre hôtels, restaurants, transporteurs et artisans. Mais surtout, il demeure l’un des rares lieux où l’on peut encore respirer un souffle d’élégance dans un Liban en lutte contre l’effondrement.

Le Lac des cygnes et une soirée presque parfaite.

J’y étais justement le 14, pour assister à la représentation du ballet Le Lac des cygnes, dans l’amphithéâtre du Casino. La performance était sublime, portée par des danseurs au souffle classique, élégants et synchrones. Le public, conquis, retenait son souffle à chaque battement d’ailes.

Mais, j’ai été peinée de constater dans le hall d’attente du théâtre, le triste sort réservé à un piano à queue ancien, à un orgue oublié, et à quelques machines de projection cinématographiques séculaires. Témoins silencieux de l’âge d’or du Casino, ces pièces de collection mériteraient d’être mises en valeur, restaurées, racontées. Au lieu de quoi, elles prennent la poussière dans l’indifférence générale.

Un symbole à réenchanter.

Le Casino du Liban reste une perle rare, un espace suspendu entre deux époques. Il témoigne de ce que le Liban a été, et peut encore être. Mais pour qu’il retrouve sa pleine majesté, il lui faudra plus que des lustres et des costumes de gala : une gestion rigoureuse, un respect accru pour les trésors du passé… et l’écoute d’un public qui, comme moi ce soir-là, ne demande qu’à rêver dans la beauté du présent.