A l’occasion de son passage au Liban, Yo-Yo Ma, le légendaire violoncelliste, s’est produit au festival international de Byblos, devant une salle pleine qui l’a applaudi vivement.

Pour ceux qui ne connaissent pas Yo-Yo Ma, ce qui est peu possible, ce grand musicien d’origine chinoise, est né à Paris de parents artistes (sa maman était chanteuse et son père, violoniste et professeur de musique). Il a commencé à quatre ans l’étude du violoncelle avec son père, puis l’a poursuivi au conservatoire de Saint-Germain-en-Laye. Après un premier concert à six ans à Paris, il est parti avec ses parents à New York, où il a suivi des cours de violoncelle à la Juilliard School. A l’âge de vingt ans, il a entamé sa carrière professionnelle auprès de Leonard Bernstein puis il est revenu en France pour jouer avec l’Orchestre national de France et l’Orchestre de Paris, sous la direction de Myung-Whun Chung.

En 2004, il sort un album dans lequel il reprend, sous la direction d’Ennio Morricone, et en collaboration avec le Roma Sinfonietta Orchestra, les plus célèbres musiques de films du compositeur italien. Plus tard, il travaillera avec le compositeur de musiques de films, John Williams.
En 2006, il rejoint la liste des « Messagers de la paix » de l’ONU, parmi lesquels, on trouve de nombreux musiciens : Luciano Pavarotti ou le jazzman, Wynton Marsalis.

2012, il reçoit le prix Polar Music.
2019, date importante pour nombre de libanais, amateurs de musique classique : le mythique violoncelliste immortalisera, encore une fois, Le Grand Bach en jouant ses Suites.
Parlons un peu de ces six suites. Il s’agit au fait de pièces musicales en six mouvements structurées de manière similaire. Chacune commence par un prélude, suivi par des allemandes ou courantes (pièces au contrepoint très structuré, ancêtres de l’allegro de sonate). Les quatrièmes mouvements sont des sarabandes (ancêtres du mouvement lent de la sonate) suivies d’un cinquième mouvement en forme de menuet, bourrée ou gavotte ce qu’on appelait dans le temps des « galanteries ». Alors que le sixième mouvement est une gigue (ancêtre du mouvement vif conclusif de la sonate). Les suites se démarquent dans l’œuvre de Bach par leur continuité ; il semble probable que Bach, lui-même les ait écrites comme un cycle : l’ordre des mouvements est particulièrement stable et ne présente aucune irrégularité, y compris dans l’ajout des intermèdes ou galanteries, ce qui ne se retrouve pas dans les autres « cycles » de suites de Bach, la complexité technique augmente de suite en suite, les trois premières suites sont écrites dans des tonalités ne présentant aucune difficulté au violoncelle ; sol majeur (les fa dièses sont d’accès aisé à toutes les positions), ré mineur (si bémol et do dièse) et do majeur (pas d’altérations) ;la quatrième suite est écrite en mi bémol majeur, tonalité plus complexe au violoncelle, la cinquième suite ajoute une scordatura, la sixième suite, écrite pour violoncelle à cinq cordes, est la plus virtuose ;

Bach a fait exprès de terminer toutes ses suites par des concerts rythmés et joyeux pour rehausser le public.
Ce 24 août, Ma a joué les yeux fermés alors qu’il naviguait dans les vastes crescendos qui tombaient dans de délicats accords. Le jeu du violoncelliste était magistral. Bien qu’il soit seul sur la grande scène, le public a été rapidement enchanté et est tombé dans une concentration feutrée que l’on ne voit pas souvent lors des représentations de musique classique au Liban.
Une fois l’ovation debout terminée, Ma a offert au public un solo rafraîchissant et improvisé, qui a vraiment montré ses compétences et sa vitesse.
Alors que les six suites en une seule sont une entreprise exigeante de toutes les personnes impliquées, la beauté de l’œuvre de Bach et les interprétations de Ma valent la peine du long concert. La nature expressive de l’interprète lors de la lecture de la musique a ajouté un charme au concert qui devait être vu, sinon entendu.